Un appartement en rouge et blanc à Copenhague
Apologie du rouge et du blanc, cet appartement-atelier est née sous l’impulsion d’une artiste plasticienne passée maître dans un art débridé du tricot et du crochet.
Du rouge, du blanc, ou encore du rouge et blanc, c’est tout : Dagmar s’impose des limites pour mieux jouer avec.
Une chaise d’Arne Jacobsen, dont les pieds sont habillés de chaussettes tricotées, un téléviseur coiffé d’une cagoule en crochet, des poupées sans visage, des tableaux, des collages, des meubles sciés, découpés et réinventés… Autant d’œuvres d’art – oui, le mot est pesé – signées de Dagmar Radmacher. Excepté quelques concessions faites au bois, le travail de l’artiste tourne autour du rouge et du blanc. « Ce binôme de couleurs m’est apparu comme une évidence. Alors, bien sûr, cela me limite. Mais c’est là que mon travail devient passionnant. Ma créativité s’accentue lorsque j’ai un "cadre". Cela me discipline », avoue dans un rire cette Blanche-Neige des temps modernes. Si elle ne se prend pas au sérieux, en revanche son mode d’expression, a contrario, l’est pour bon nombre de Danois.
Dans une maison en forme d’œuvre d’art, il était une fois une magicienne. Tout y est parfait, jusqu’au prince charmant – même si parfois, celui-ci rêve d’une petite pièce rien que pour lui, pleine de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel…
Drôle et fascinant
Dagmar Radmacher est une artiste reconnue. Après une collaboration avec la Maison des architectes à Copenhague, elle prépare actuellement un ouvrage, Cover up my world in red and white (« Recouvrir mon univers de rouge et blanc »). Mads Quistgaard, son compagnon, reste admiratif. Lui aussi est un créatif, mais en agence, où il occupe le poste de directeur de création chez Pleks, société spécialisée dans le graphisme à Copenhague. « Pour moi, le travail de Dagmar est à la fois drôle et fascinant. J’ai l’impression de vivre au quotidien dans une œuvre d’art. Bien sûr, c’est très stimulant pour nous qui travaillons avec les formes, l’architecture et les expressions graphiques, mais j’avoue parfois que j’aimerais avoir une pièce à moi, avec des valeurs différentes », ose Mads, aussitôt relayé par Dagmar : « Je comprends, ma gamme de couleurs est si limitée ! Mais je n’y vois que du positif. Cette contrainte est mon booster d’énergie ! »
bois blond !
2. La cuisine, fonctionnelle, composée d’éléments Ikea, est minimaliste et ordonnée. Le bois blond trouve sa place uniquement parce
qu’il rappelle la couleur du pain, que nos hôtes adorent.
Seul le bois blond trouve grâce aux yeux de l’artiste. Sinon, que ce soit dans ses créations ou son shopping au quotidien, le mot d’ordre reste « rouge » et/ou « blanc ». Une autre partie du travail artistique de Dagmar Radmacher consiste à faire et défaire. Par exemple, elle se filme en train de faire du crochet ou de tricoter, et ensuite de défaire son ouvrage et de recommencer. « La répétition - encore une sorte de limitation -, illustre une approche de la vie plus orientée vers le processus que vers le but. J’ai toujours fait du crochet, bien longtemps avant de savoir que j’allais devenir artiste. Une partie de mon art tourne autour de ce thème de l’éternel recommencement. Le tricotage et le crochet sont fantastiques pour exprimer cette démarche. »
Les sentiments du point de Jersey
Esprit bohème avec un sens aiguisé du rangement et de la scénographie, Dagmar aime l’ordre.
2. Tableaux et collages font aussi partie de son univers.
Customiser, recycler, tricoter...en intérieur comme en extérieur !
2. Dans les petits espaces, chaque centimètre carré compte. Entre rangements et déco, Dagmar a investi tous les coins et recoins disponibles. Ici, dans la salle de bains, la concentration est à son comble, mais toujours de blanc et rouge vêtue. Pour agrandir les lieux, un miroir prolonge le couloir par son reflet. Même le radiateur est investi : bois de récupération, jolis sacs et papier de toilette d’effet très graphique et astucieusement réchauffé.
Au cours de l’été 2008, Dagmar Radmacher a organisé un événement artistique avec un artiste italien. Le projet, qui a duré deux jours, s’est intitulé Projets sans fins. Dagmar s’est assise à l’intérieur d’une petite armoire en bois, installée sur le trottoir d’une ville italienne et a entamé des ouvrages au crochet les uns après les autres. Aucun n’a été terminé – tel était le concept -, et bon nombre d’habitants se souviennent encore de la fille bizarre installée dans le placard. « Le cheminement est la chose importante, le fait que cela progresse lentement ou ne se termine pas n’est pas ma préoccupation. Avec une telle expression artistique, c’est évident qu’il y a un effet contagieux sur notre maison et sur notre vie. » Entre humour et fantaisie, Dagmar invente une vie ordonnée dans son logis et déstructurée dans son for intérieur… Une jolie leçon de choses à méditer !